Bon, ce souvenir là; amputé ou pas...
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Bon, ce souvenir là; amputé ou pas...
j'avais décidé de me rendre en Sologne pour voir mes parents. Je pressentais que mon père malade n’en n’avait plus pour très longtemps, même si ma mère ne laisser jamais filtrer grand chose de l’évolution des événements de la maison.
Ensemble nous sommes rendu à l’hôpital. Je l’avais vu terriblement amaigri l’an passé. Maintenant c’était presque un squelette que j’avais devant les yeux. Il ne pouvait plus parler. Nous sommes restés ainsi près d’une heure entre demi-sourires et grimaces douloureuses, presque les mêmes que celles qu’il faisait jadis à table pour que l’on s’apitoie sur son sort, sauf qu’a présent il n’était plus question de cinéma.
Puis, péniblement, il a levé ses bras et les a croisé devant lui en signe de négation avant de les reposer le long du corps.
Alors j'ai laissé mon père seul après l'avoir serré dans mes bras. Maman avait vu dans son geste un signe de fatigue, comme si il ne supportait plus cette conversation muette avec nous. Moi je savais que cela signifiait; "Adieu, j'ai fini de vivre!", je l'ai salué pour la dernière fois.
Il savait que je savais, nous savions, elle ne savait pas.
Rien que pour nous deux, pour une fois, la présence physique de ma mère n'y pourrait rien.
Et puis je suis reparti a Toul dans la soirée…
…Seul avant l'aube :
Comprendre le fil de sa vie....
Quelque soient les apparences, il y a une cohérence secrète dans nos actions, on ne cesse pourtant de redouter de ne pas être cohérent avec soit même, de perdre sa propre trace en quelques sorte.
Il arrive cependant de faire des erreurs dans l'interprétation de ses actes passés comme on le ferait pour des textes anciens.
Dispersé... Comme si des morceaux de soi étaient projetés ici et là.
Y a t il un cours souterrain des choses grâce auquel il est possible de trouver un semblant de réconfort lors d'un point de contact de ce cours avec l'extérieur; un rêve, une résurgence, une source?
C'est peut-être la passion qui est à l'origine de l'insomnie; un désir ardant d'être sans y parvenir.
Papa ne dormait plus la nuit et somnolait le jour.
L'insomnie amène son lot de vertiges. Il faut se rassurer avant de s'endormir pour avoir quelque chose à quoi se raccrocher quand on se réveillera.
A partir d'une certaine heure, il faut arrêter de penser, comment s'y résoudre? lorsqu'on se réveille un peu avant l'aube, les choses passées et à venir semblent insurmontables.
Le vertige insurmontable meurt avant l'aube.
Dans les hôpitaux, les gens meurent souvent un peu avant l'aube. Papa est mort la nuit suivant ma visite, vers 4 heures du matin.
Ensemble nous sommes rendu à l’hôpital. Je l’avais vu terriblement amaigri l’an passé. Maintenant c’était presque un squelette que j’avais devant les yeux. Il ne pouvait plus parler. Nous sommes restés ainsi près d’une heure entre demi-sourires et grimaces douloureuses, presque les mêmes que celles qu’il faisait jadis à table pour que l’on s’apitoie sur son sort, sauf qu’a présent il n’était plus question de cinéma.
Puis, péniblement, il a levé ses bras et les a croisé devant lui en signe de négation avant de les reposer le long du corps.
Alors j'ai laissé mon père seul après l'avoir serré dans mes bras. Maman avait vu dans son geste un signe de fatigue, comme si il ne supportait plus cette conversation muette avec nous. Moi je savais que cela signifiait; "Adieu, j'ai fini de vivre!", je l'ai salué pour la dernière fois.
Il savait que je savais, nous savions, elle ne savait pas.
Rien que pour nous deux, pour une fois, la présence physique de ma mère n'y pourrait rien.
Et puis je suis reparti a Toul dans la soirée…
…Seul avant l'aube :
Comprendre le fil de sa vie....
Quelque soient les apparences, il y a une cohérence secrète dans nos actions, on ne cesse pourtant de redouter de ne pas être cohérent avec soit même, de perdre sa propre trace en quelques sorte.
Il arrive cependant de faire des erreurs dans l'interprétation de ses actes passés comme on le ferait pour des textes anciens.
Dispersé... Comme si des morceaux de soi étaient projetés ici et là.
Y a t il un cours souterrain des choses grâce auquel il est possible de trouver un semblant de réconfort lors d'un point de contact de ce cours avec l'extérieur; un rêve, une résurgence, une source?
C'est peut-être la passion qui est à l'origine de l'insomnie; un désir ardant d'être sans y parvenir.
Papa ne dormait plus la nuit et somnolait le jour.
L'insomnie amène son lot de vertiges. Il faut se rassurer avant de s'endormir pour avoir quelque chose à quoi se raccrocher quand on se réveillera.
A partir d'une certaine heure, il faut arrêter de penser, comment s'y résoudre? lorsqu'on se réveille un peu avant l'aube, les choses passées et à venir semblent insurmontables.
Le vertige insurmontable meurt avant l'aube.
Dans les hôpitaux, les gens meurent souvent un peu avant l'aube. Papa est mort la nuit suivant ma visite, vers 4 heures du matin.
Invité- Invité
Re: Bon, ce souvenir là; amputé ou pas...
J'aime beaucoup ton approche nimbée de philosophie de la fin de vie. Fin de vie, ou fin d'une vie ???
Invité- Invité
Re: Bon, ce souvenir là; amputé ou pas...
D'une vie je crois. Faut pas généraliser. Les chemins sont tellement différents.
Invité- Invité
Re: Bon, ce souvenir là; amputé ou pas...
A cette heure, je suis obligé de survoler. Trop de souvenir reviennent a moi, et il y ades choses que je ne peux me permettre a certains endroit.
Mais ce soir, je vais lire et relire ce post et sents deja que je vais en avoir gros sur la patate (comme disait ma mère !)
Mais ce soir, je vais lire et relire ce post et sents deja que je vais en avoir gros sur la patate (comme disait ma mère !)
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GG la frite Contact Régional ADEPA pour la LORRAINE
Mon site internet : http://On_a_qu'une_vie
Je n'avais pas vu que tu portais des chaînes, à trop vouloir te regarder, J'en oubliais les miennes
Re: Bon, ce souvenir là; amputé ou pas...
Jean Luc,
Ton récit m'a émue en me tirant les larmes
Ca m'a fait mal, j'ai pensé à mon Papa en te lisant
C'était ce 23 juin 2003.. cela faisait un moment qu'il faisait des allers retours à l'hôpital, puis la dernière fois qu'il y est allé, ce 23 juin, je l'ai vu le matin comme tous les matins
J'allais le voir avant d'aller bosser
Je lui ai fait un bisou avant de partir et je lui ai dit : a ce soir
Je l'ai revu le soir, oui, mais endormi à tout jamais
Aujourd'hui j'ai mal très mal, il me manque terriblement...
Je pleure bien souvent de ne plus le voir
Ton récit m'a émue en me tirant les larmes
Ca m'a fait mal, j'ai pensé à mon Papa en te lisant
C'était ce 23 juin 2003.. cela faisait un moment qu'il faisait des allers retours à l'hôpital, puis la dernière fois qu'il y est allé, ce 23 juin, je l'ai vu le matin comme tous les matins
J'allais le voir avant d'aller bosser
Je lui ai fait un bisou avant de partir et je lui ai dit : a ce soir
Je l'ai revu le soir, oui, mais endormi à tout jamais
Aujourd'hui j'ai mal très mal, il me manque terriblement...
Je pleure bien souvent de ne plus le voir
Angeline5- Actif
- Nombre de messages : 209
Age : 58
Localisation : Hyères
Type d'amputation : tibiale
Date d'inscription : 26/02/2012
Re: Bon, ce souvenir là; amputé ou pas...
Je ne voulais pas tirer les larmes de qui que ce soit... Mais au fond c'est une chance qu'elles coulent. Il ne m'en est jamais venu à moi, pas pour ça. ça me paraissait très naturel. Pour lui je crois que ça a dû être super dur. Je me demandait quelquefois si j'étais insensible mais j'ai bien pressenti les derniers instants à 400 bornes de distance, alors je me dit que j'étais quand même à l'écoute.
Devant le désarrois des gens tout juste amputés c'est la même chose; c'est comme une sorte de système analytique qui se met en place. Je puise dans ma sensibilité mais je ne suis pas du tout gêné par l'émotion. J'éprouve une sorte de fierté à comprendre qui alimente mon égo au lieu de l'ébranler.
Un jour je me suis retrouvé devant un enfant de 5 ans qui venait de perdre ses deux bras et ses deux jambes. Je venait de démissionner de mon poste de prothésiste pour un poste d'ergothérapeute et je me sentais archi démuni.
Lorsque j'ai repris mon poste de prothésiste je l'ai revu au centre mais il ne me restait que l'émotion devant lui. J'étais incapable de m'occuper de lui. ça a été la seule fois où ça m'est arrivé. C'était horrible pour moi. Je suis toujours gêné quand je le vois.
Je me suis un peu égaré, là... Besoin de parler....
J'ai une amie qui pleure très souvent son père disparu. Je trouve ça très beau de pleurer son père disparu.
Devant le désarrois des gens tout juste amputés c'est la même chose; c'est comme une sorte de système analytique qui se met en place. Je puise dans ma sensibilité mais je ne suis pas du tout gêné par l'émotion. J'éprouve une sorte de fierté à comprendre qui alimente mon égo au lieu de l'ébranler.
Un jour je me suis retrouvé devant un enfant de 5 ans qui venait de perdre ses deux bras et ses deux jambes. Je venait de démissionner de mon poste de prothésiste pour un poste d'ergothérapeute et je me sentais archi démuni.
Lorsque j'ai repris mon poste de prothésiste je l'ai revu au centre mais il ne me restait que l'émotion devant lui. J'étais incapable de m'occuper de lui. ça a été la seule fois où ça m'est arrivé. C'était horrible pour moi. Je suis toujours gêné quand je le vois.
Je me suis un peu égaré, là... Besoin de parler....
J'ai une amie qui pleure très souvent son père disparu. Je trouve ça très beau de pleurer son père disparu.
Invité- Invité
Re: Bon, ce souvenir là; amputé ou pas...
Merci pour tes mots Jean Luc
Bonne journée
Amitiés
corinne
Bonne journée
Amitiés
corinne
Angeline5- Actif
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Localisation : Hyères
Type d'amputation : tibiale
Date d'inscription : 26/02/2012
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